Tout ce que touche le capitalisme devient toxique
Texte de Gifford Hartman publié en janvier 2010 sous le titre « Crisis in California: Everything Touched by Capital Turns Toxic »
« Je serais très content si vous pouviez me trouver quoi que ce soit de bon (substantiel) relatif aux conditions économiques en Californie …. Pour moi, la Californie est très importante car nulle part ailleurs, le bouleversement dû à la concentration capitaliste ne s’est installé à une telle vitesse et de façon aussi cynique. »
Lettre de Karl Marx à Friedrich Sorge, 1880
La concentration capitaliste qu’observait Marx en 1880 s’est poursuivie jusqu’à aujourd’hui avec une telle rapidité que les conditions économiques en Californie ont mûri au point d’en être devenues toxiques (1). Tandis qu’il pollue autant l’environnement rural que l’espace urbanisé, le capital a atteint un niveau de productivité et une capacité à accroître la production de marchandises encore jamais imaginés. Cette surcapacité est en contradiction flagrante avec son incapacité croissante à satisfaire les besoins humains ; l’incapacité du capital à accumuler de la valeur rend superflus des secteurs entiers de la classe ouvrière. C’est dans la vallée centrale de Californie que ces conditions sont devenues les plus dangereuses ; des maisons inoccupées côtoient la misère sordide des nouveaux sans-abris qui se réfugient dans des villages de tentes (Tent Cities) (2) et des bidonvilles déjà surpeuplés et qui prolifèrent. Ce bouleversement révèle les mystifications du capitalisme et en montre sa réalité, comme on le voit avec les chiffres du tableau suivant pour l’ensemble des Etats-Unis :
Les saisies aux Etats-Unis
Nouvelles expulsions : 6 600 par jour
Une expulsion toutes les 13 secondes (3)
Nombre de logements inoccupés : 19 000 000 (4)
Nombre de personnes sans logement : 3 500 000 (y compris 1 350 000 enfants) (5)
Ainsi le calcul est simple :
Il y a au moins cinq logement vides par personne sans domicile !
Les Etats-Unis, un bidonville
Ces relations sociales toxiques ont montré leur totale irrationalité en mai 2009, quand les banques ont détruit au bulldozer les toutes nouvelles maisons McMansion (6) invendues, situées dans des « exurbs » (7) du Sud de la Californie. Dans tous les Etats-Unis, les gens envoyés dans les foyers n’y trouvent plus de place, car ces abris sont déjà remplis au-delà de leur capacité ; à Sacramento, capitale de Californie, le foyer de St. John, destiné aux femmes et aux enfants, tourne avec 350 personnes par nuit (8). Sacramento est devenue mondialement connue, quand sa « Tent City » a fait le tour du monde des médias.
Lorsque le gouverneur de Californie, Arnold Schwarzenegger, et le maire de Sacramento prirent la décision d’expulser « Tent City », le magistrat justifia cette opération en affirmant : « Ils ne peuvent pas rester ici, cette terre est toxique (9). »
Bien que les Tent Cities existent partout aux Etats-Unis, c’est en Californie qu’il en est apparu le plus.
La vallée centrale de Californie : au cœur de la région toxique, le long de l’autoroute 99
« Ainsi, malgré toutes les vantardises sur l’industrie principale de cet Etat [l’agriculture], les milliards de dollars qu’elle apporte à l’économie et les miracles qu’elle a accompli dans la production et l’innovation technique, l’agriculture de Californie est en train de disparaître, car la valeur croissante de son sol provient des ventes de terrains constructibles ou de l’immobilier plus que du coton, du bétail ou des amandes. »
Gray Brechin, Farewell, Promised Land (10).
Voyage toxique
La Vallée centrale de Californie s’étend sur 720 km de long et 80 km de large. Elle est située entre les montagnes de la Sierra Nevada et de Coast Range. Les deux principaux cours d’eau sont les fleuves Sacramento et San Joaquin, traversant l’un le nord et l’autre le sud et donnant leur nom aux deux parties de la vallée ; ils se rejoignent en un immense delta qui se jette dans la baie de San Francisco.
C’est la région agricole la plus productive du monde.
C’est aussi la région où, depuis les années 1970, un des sols les plus fertiles de la planète a été recouvert par le développement de zones pavillonnaires et de lotissements néo-ruraux. La vallée connaît probablement le taux de saisies de maisons le plus élevé du monde ; certains endroits ont enregistré les plus bas salaires de l’histoire des Etats-Unis et les taux de chômage les plus élevés. L’air de la ville d’Arvin, dans l’extrême sud de la Vallée, est le plus pollué des Etats-Unis (14).
L’autoroute 99 parcourt du nord au sud le cœur de la vallée. Sacramento est la plaque tournante entre les moitiés nord et sud de la Vallée. Elle est entourée d’une banlieue tentaculaire qui a remplacé la terre agricole. Quand on voyage le long de cette autoroute, c’est une longue suite de constructions : galeries marchandes ; concessionnaires automobiles ; boutiques vendant du matériel de construction, des tracteurs, des bulldozers, des tractopelles… ; marchands de bateaux de plaisance ; interminables rangées de caravanes ; emplacements de bureaux ; panneaux ; et ponts enjambant des rivières et certaines parties du delta.
La grande ville suivante est Stockton, un port en eau profonde qui relie les principales rivières au delta, à la baie, et au commerce transPacifique ; c’est un port important. Elle a été récemment qualifiée du titre peu glorieux de « ville la plus misérable des Etats-Unis » par le magazine Forbes.
En continuant vers le sud, c’est encore et toujours cette même culture américaine de la consommation : des galeries avec des parkings immenses ; des églises et même un immense lycée chrétien dans la ville de Ripon ; des voies de chemin de fer et des gares de triage le long de l’autoroute 99 ; d’immenses silos à grains et des constructions pour acheminer les produits agricoles, la plupart abandonnés.
Ensuite vient Modesto, connue pour être la première ville des Etats-Unis pour le vol des voitures et la cinquième dans la liste des villes les plus pauvres, établie par Forbes. Elle est entourée de terrains fertiles qui furent construits pendant le boom immobilier pour fournir de nouveaux logements à des banlieusards venant d’aussi loin que Sacramento ou Fresno, et même à des gens prêts à faire plus de deux heures de voiture pour aller dans la Baie de San Francisco et autant pour en revenir.
Merced est la deuxième dans la liste des villes des Etats-Unis connaissant les plus forts taux de chômage, avec 20,4 % (15). On y voit, le long de l’autoroute 99, les mêmes chaînes de magasins que partout ailleurs aux Etats-Unis. Et, juste à côté, l’agriculture industrielle : des champs, des vergers, des hangars à bétail le long de l’autoroute ainsi que des marchands de machines agricoles, de tracteurs, et de fourgons à bestiaux. Un grand nombre de canaux d’irrigation amènent l’eau du Nord humide vers le Sud très sec de la Vallée. Beaucoup de ces infrastructures industrielles sont en train de rouiller et sont abandonnées, il y a beaucoup d’usines avec d’énormes panneaux « A vendre ».
Puis voici Fresno, la cinquième ville de Californie avec 500 000 habitants. C’est la plaque tournante de la partie sud de la vallée et elle semble toujours baigner dans un brouillard brunâtre, surtout pendant les mois d’été où la chaleur est étouffante. C’est la « capitale de l’asthme de la Californie », cette affection touchant un enfant sur trois (16). C’est aussi le comté agricole le plus productif et le plus rentable de tous les Etats-Unis.
Il y avait là aussi, en ville, trois grandes « Tent Cities » (17) ainsi que d’autres campements plus petits. La première « Tent City », située sur un terrain de la société ferroviaire Union Pacific, fut expulsée en juillet 2009. Ce lieu était littéralement toxique : on y a découvert des eaux de vidange suintant par des trous dans le sol au cours de l’été 2008, car il avait sans doute servi pour réparer des voitures.
Une autre fut surnommée « New Jack City » après la sortie du film dans les années 1990 (18) sur les gangs de la drogue, car deux meurtres y avaient déjà été commis.
La troisième comptait beaucoup d’abris fabriqués avec du bois de récupération. On l’appelle aussi « Taco Flats » ou « Little Tijuana », car la plupart des occupants sont des Latinos qui viennent là pour chercher du travail dans l’agriculture. La sécheresse, qui a duré trois ans, a entraîné une forte diminution des surfaces cultivées et a donc réduit l’offre de travail.
La mécanisation de plus en plus poussée de l’agriculture et l’utilisation des OGM permettent d’augmenter les rendements en utilisant moins de travailleurs. Le travail agricole a toujours été saisonnier et instable. En général, 92 % des travailleurs agricoles sont des migrants ; cela remonte à la ruée vers l’or de 1849. A cette époque des travailleurs chinois, les coolies, étaient amenés aux Etats-Unis pour la construction des voies de chemin de fer. Une fois que le transcontinental fut terminé, en 1869, beaucoup d’entre eux furent employés dans les mines jusqu’à ce que le racisme et la diminution des rendements les fassent partir. Certains travaillèrent dans les champs jusqu’à ce que les pogroms anti-chinois, qui commencèrent vers la fin des années 1870, les chassent vers les villes (19).
Les fermiers se tournèrent alors vers les immigrés japonais, sikhs, philippins, arméniens, italiens et portugais ; plus tard ils employèrent des « Okies » et « Arkies » (on appelait ainsi des Blancs nés aux Etats-Unis, anciens fermiers ou métayers venant d’Oklahoma et d’Arkansas, et même du Missouri et du Texas), réfugiés du Dust Bowl (20) pendant la Grande Dépression. Des Mexicains furent amenés avec le programme Bracero en 1942 et ils forment la majorité des travailleurs d’aujourd’hui, avec les immigrés d’Amérique centrale.
One Big Union
C’est à Fresno que s’est déroulée la lutte victorieuse des IWW (autrement appelés wobblies) (21) pour la liberté de parole, qui a duré six mois en 1910-1911. Plusieurs centaines de wobblies et travailleurs migrants vinrent de toute la côte ouest pour soutenir la revendication du droit à se réunir dans la rue et à prendre la parole du haut de leurs « soapbox » (boîte à savon sur laquelle se juchaient les orateurs IWW).
A cette époque, Fresno se qualifiait elle-même de « capitale mondiale du raisin » et à la fin de chaque été, 5 000 travailleurs japonais et 3 000 hobos (22) y arrivaient pour les vendanges. Un peu comme dans les « Tent Cities » d’aujourd’hui, les travailleurs campaient en ville et cherchaient à s’embaucher au « marché aux esclaves ». Les Japonais étaient souvent très unis et prêts à faire grève pour de meilleurs salaires et de meilleures conditions [de travail et de logement]. Sachant que les IWW essayaient d’organiser les travailleurs quelles que soient leur race, nationalité ou origine ethnique, les élites locales étaient terrifiées à l’idée que les Japonais puissent rejoindre les Wobblies.
Pour empêcher la liberté de parole, il y avait un harcèlement violent et des arrestations en masse d’orateurs de « soapboxes » (boîtes à savons sur lesquelles se juchaient les orateurs) des IWW, souvent avec l’aide de milices.
Au tribunal, les Wobblies saisissaient toutes les occasions pour s’exprimer le plus possible dans les procès politiques, pour faire de la propagande pour la lutte de classe. Leur lutte pour la liberté de parole fut victorieuse et conduisit les responsables politiques de Fresno et les propriétaires terriens à se montrer plus tolérants envers les tentatives de l’AFL, le syndicat conservateur, pour organiser les ouvriers agricoles.
La plus grande bagarre avec l’IWW eut lieu en 1913, dans la vallée de Sacramento, dans la région de culture du houblon. Le Durst Ranch, à Wheatland, publia dans tous les journaux de Californie une offre d’embauche de 2 700 ouvriers, alors qu’il n’en avait besoin que de 1 500. Il voulait ainsi créer un surplus de main-d’œuvre pour baisser les salaires. 2 800 ouvriers de 27 origines ethniques différentes, parlant 24 langues, se présentèrent. Il faisait extrêmement chaud, il n’y avait pas d’eau potable et il y avait seulement neuf toilettes extérieures. Les gens devaient dormir dehors s’ils ne voulaient pas payer une tente à Durst ; sans eau potable, la seule possibilité était d’acheter 5 cents une limonade au cousin de Durst. Les boutiques de la ville n’avaient pas le droit de vendre sur l’exploitation, obligeant les gens à acheter à la propre boutique de Durst. Comme il n’y avait ni ramassage des ordures, ni aucune hygiène, beaucoup de gens tombaient malades. Durst retenait 10 % sur la paye jusqu’à la fin de la récolte, espérant que ces conditions dégueulasses entraîneraient beaucoup de départs sans que les gens touchent leur salaire complet.
Environ une centaine d’hommes avaient l’expérience des IWW ; ils convoquèrent rapidement un meeting qui mit davantage l’accent sur les mauvaises conditions de vie que sur les salaires. Lorsque 2 000 personnes se rassemblèrent pour écouter les organisateurs IWW, le meeting fut dispersé par le shérif. Dans l’émeute qui suivit. quatre personnes furent tuées, deux ouvriers et deux hommes du shérif. La plupart des ouvriers quittèrent Durst Ranch et se dispersèrent. Une chasse aux sorcières fut engagée contre les Wobblies, accusés d’inciter à l’émeute, et on terrorisa les militants dans toute la Californie. Une enquête de l’Etat sur les conditions misérables du ranch eut pour conséquence de nouvelles lois imposant des améliorations des conditions de vie des ouvriers agricoles.
Le mouvement mené par Cesar Chavez à Delano, en 1965, pour organiser les ouvriers agricoles, donna naissance à l’UFW (United Farm Workers) et montra que cinquante ans après, les conditions des ouvriers de la Vallée n’avaient pas changé. Le maintien d’une « armée de réserve » utilisait le racisme pour entretenir division et faiblesse chez les ouvriers, entraînait des salaires faibles et les conditions des années 1960 n’étaient pas très différentes de celles qui avaient provoqué la révolte de Wheatland en 1913. Et elles sont presque les mêmes aujourd’hui.
La bulle immobilière dans les « exurbs »
L’emploi agricole a toujours été saisonnier, donc la croissance de la construction immobilière dans la Vallée centrale depuis trente ans a permis aux ouvriers d’avoir une maison en dur. Le boom immobilier suivit de près la bulle Internet de 2001, les besoins en main-d’œuvre augmentèrent, jusqu’à ce que la bulle immobilière éclate à son tour en 2007. En même temps que la diminution de l’emploi dans la construction, la sécheresse, la poursuite de la mécanisation et de la concentration dans l’agriculture ont entraîné encore plus de chômage. Il y a tout simplement moins de fermes, chacune étant plus grande et plus productive. Ce processus de concentration capitaliste croissante, dans une région qui était déjà la première des Etats-Unis pour l’industrialisation de l’agriculture, renforce le processus de remplacement des gens par des machines, de travail vivant par du « travail mort ».
Pour améliorer la production agricole sur une telle échelle, il fallait construire un vaste réseau d’acheminement et de stockage de l’eau, ce qui fut fait en deux étapes. Avant le projet de 1937 du gouvernement fédéral pour la Vallée centrale, il n’y avait pas assez d’eau dans la vallée San Joaquin pour faire pousser des légumes, des fruits ou des amandes. Il fallait construire tout un système d’irrigation : des canaux, des barrages, des réservoirs et des pompes pour amener l’eau depuis le niveau de la mer jusqu’à 150 mètres d’altitude dans le sud aride. En 1961, le State Water Project étendit ce système pour amener l’eau encore plus au sud, au delà de la Vallée, en Californie du Sud, créant ainsi le plus grand réseau d’irrigation du monde.
Le développement de la Californie a toujours été fondé sur l’idéologie d’une croissance sans fin et de la valeur immobilière du sol. Dès le début des années 1980, des lois dérégulèrent la distribution de l’eau ; les technocrates des compagnies des eaux furent moins liés à l’agriculture et davantage aux promoteurs. Les électeurs des banlieues approuvèrent des lois autorisant un développement encore plus tentaculaire. La demande d’adductions d’eau plus étendues créa les conditions pour de futures périodes de sécheresse.
L’urbanisation de cette terre fertile, avec la création de villes nouvelles et de banlieues, modifia l’utilisation de l’eau : moins pour l’agriculture et plus pour les nouvelles constructions. Le développement de centres aussi éloignés que Orange County au Sud de la Californie, Las Vegas dans le Nevada et Phoenix en Arizona (à plus de 1 000 km, dans la Sunbelt à la croissance rapide) fut ainsi rendu possible. Cette eau, échappant aux obligations de l’agriculture de la Vallée, contribuait à entretenir le gigantesque boom immobilier dans tout l’ouest des Etats-Unis.
Travail toxique
La Vallée a été cultivée intensivement après la découverte de l’or en 1848 ; le capitalisme surgit apparemment de nulle part. C’est encore grâce à l’or de Californie que l’économie mondiale se rétablit à l’époque de la révolution en Europe et que l’urbanisation industrielle se développa à travers tout le continent nord-américain. L’accumulation capitaliste autour de la baie de San Francisco fut l’une des plus dynamiques de la fin du xixe siècle. Le développement ultérieur de la Californie reposa sur « l’or vert et noir » (23), agriculture intensive et pétrole. Dès le début du xxe siècle plusieurs comtés de Californie figurèrent en tête pour la production américaine dans ces deux domaines.
Ce processus économique et social, décrit par Marx comme le passage de la domination formelle à la domination réelle du capital sur le travail (24), créa des secteurs agricoles hautement productifs, qui bénéficièrent de moyens de transport plus modernes pour vendre leurs produits sur le marché mondial. Ces transformations jetèrent les producteurs les plus faibles dans la crise et amenèrent des millions de paysans d’Europe à quitter les campagnes, et pour beaucoup d’entre eux à émigrer vers d’autres pays comme les Etats-Unis. Plus dramatique encore, ce processus entraîna la baisse du prix des produits alimentaires, donc la baisse du coût de la force de travail ; dans certains cas le niveau de vie de la classe ouvrière a augmenté bien que les salaires aient baissé (19).
Le roman de Frank Norris, The Octopus : A California Story (1901), est une vivante peinture des débuts de cette prolétarisation de la force de travail dans l’agriculture dans la Vallée centrale dans les années 1880. Une génération plus tard, John Steinbeck, dans son roman Les Raisins de la colère, complète, à travers l’histoire de de la famille Joad, la description de ce processus de prolétarisation des fermiers d’Oklahoma chassés de la campagne par « le Dust Bowl », venus se réfugier dans la Vallée centrale et y cherchant désespérément du travail pendant la Grande Dépression.
Ces conditions sont les mêmes aujourd’hui pour toute une armée de travailleurs agricoles latinos, parcourant la Californie à la recherche d’un dur travail mal payé, dans une grande précarité, avec cette différence importante que l’exposition aux produits chimiques toxiques est plus grave. Comme les fermes et les ranchs sont de plus en plus concentrés et centralisés, ils se sont orientés vers une production moins diversifiée et plus lucrative, de cultures de rapport et d’élevage. Entre 1996 et 2006 la production laitière a augmenté de 72 % et celle d’amandes de 127 % (25).
Il est stupéfiant de voir que 80 % de la production mondiale d’amandes provient des 250 000 hectares d’amandiers de la Vallée centrale. Mais cette forme de monoculture a des effets toxiques : les abeilles sont nécessaires pour polliniser les amandiers, mais elles ne sont tout simplement pas assez nombreuses dans la Vallée. Plus de 40 milliards d’abeilles sont amenées en février pour les trois semaines de floraison des amandiers. Certaines arrivent par camions, d’aussi loin que la Nouvelle Angleterre et d’autres, par avion, d’encore plus loin, notamment d’Australie.
En route, les abeilles sont nourries avec une nourriture bon marché pour insectes : « Sirop de maïs riche en fructose et pollen importé de Chine (27). » Ce mode de vie empoisonné où les abeilles sont prostituées pour de l’argent est peut-être la cause du Syndrome d’effondrement des colonies d’abeilles [il s’agit du phénomène appelé CCD, pour l’expression anglaise « Colony Collapse Disorder », ou « syndrome de disparition des abeilles » ou encore « Fall-Dwindle Disease » (maladie du déclin automnal des abeilles) ; ce phénomène épidémique d’ampleur mondiale touche les abeilles domestiques et peut-être sauvages, et par contre-coup la production apicole. Il reste inexpliqué.] : 80 % des abeilles ont quitté leurs ruches et ne sont jamais revenues. Comme les abeilles pollinisent environ les deux tiers des plantes qui ensuite se retrouvent dans la nourriture, cela pourrait se révéler désastreux.
Au fur et à mesure que l’agriculture devient plus mécanisée et automatisée, elle met de plus en plus de gens au chômage. Avec l’effondrement presque total de la construction immobilière, le taux officiel de chômage dans la vallée de San Joaquin est de 15,4 %, ce qui ne prend pas en compte ceux qui sont sous-employés ou ceux qui ont quitté leur travail pour en chercher un autre. Le taux actuel est probablement le double ; le comté qui enregistre le taux officiel le plus élevé celui de Colusa, dans la vallée de Sacramento : 26,7 % (28).
La « capitale du chômage » de Californie est Mendota, une ville située à 50 km à l’ouest de Fresno et comptant un peu moins de 10 000 habitants, Latinos à 95 %. Les anciens ouvriers agricoles forment presque 41 % des chômeurs. Mendota prétend être la « capitale mondiale du cantaloup » (variété de melon), mais c’est une plante qui a besoin d’irrigation et la sécheresse a empêché de la planter. En ville l’alcoolisme est chronique et les structures sociales se sont effondrées ; le seul travail possible se trouve à la prison fédérale de Mendota, située pas très loin, dont la construction n’est achevée qu’à 40 % à cause de problèmes de budget. Il manque 115 millions de dollars pour la terminer, aussi les 49,9 millions de dollars promis par Obama donneraient-ils un coup de fouet… son achèvement permettra de créer 350 emplois. Mais si l’effondrement social continue, les habitants de Mendota devront soit être embauchés comme gardiens de prison soit se retrouver derrière les barreaux. Les prisons sont une industrie florissante en Californie, où un prisonnier sur six est condamné à vie.
Automédication toxique
Les Tent Cities de Fresno sont confrontées à une toxicomanie élevée, surtout de la methamphétamine (appelée couramment « meth »ou « crystal meth »). Les personnels de santé ont déclaré que l’usage de cette drogue psychostimulante et créant une forte dépendance a atteint des proportions « épidémiques », donnant à Fresno l’appellation de « capitale mondiale de la meth ».
C’est dans la vallée que la fabrication de cette drogue moderne a pris son essor lorsqu’elle est devenue illégale [dans les années 1960] : elle fut alors fabriquée ici et distribuée par des gangs de motards comme les Hell’s Angels. Les réseaux de motards de la drogue ont été démantelés par la police au début des années 1990, mais ils ont été remplacés par des réseaux de drogue mexicains utilisant des moyens plus rationalisés de production et de distribution.
La vallée autour de Fresno est le centre de la production de meth, non seulement en raison de ceux qui la contrôlent sur une grande échelle, mais aussi en raison de dizaines de milliers de petits producteurs, qui utilisent tous des installations rurales pour leurs labos clandestins évitant ainsi leur détection. Les produits chimiques utilisés pour fabriquer la meth ne sont pas seulement hautement toxiques, mais aussi très inflammables. Beaucoup de labos fabriquant de la meth ont explosé à cause de ça, tuant les fabricants et incendiant tous les bâtiments alentour. Pour chaque kilo de meth produit, il y a cinq à sept kilos de déchets. Ces déchets toxiques sont souvent enfouis dans des zones rurales éloignées, comme les réserves ou les forêts des collines entourant la Vallée.
Bakersfield et les déchets toxiques
de l’extrême sud de la vallée
On a découvert du pétrole dans la partie sud de la Vallée, dans le comté de Kern, en 1899. Ses gisements de pétrole en ont fait un des comtés des plus rentables des Etats-Unis ; la ville de Bakersfield est appelée « capitale du pétrole de Californie ». Les raffineries ajoutent à la pollution de l’air, rejetant des substances chimiques comme de l’acide fluorhydrique. Bakersfield tfigure en tête du classement des villes les plus polluées des Etats-Unis, au vu de la quantité de particules (29). Le magazine Women’s Health a classé Bakersfield comme la ville des Etats-Unis la plus malsaine pour les femmes (30).
L’extrême sud de la vallée était un désert jusqu’à ce que les projets d’adduction d’eau rendent possible l’irrigation. Le sol contient du sel et des métaux alcalins (alcalis) venant d’anciens fonds marins ; ceux-ci sont lessivés par l’irrigation et se mélangent avec les produits chimiques de l’agriculture, produisant une eau toxique. Il avait été décidé de faire un drainage énorme le long du centre de la Vallée pour pomper cette eau polluée et la rejeter dans la Baie de San Francisco. Mais ce projet ne fut jamais réalisé à cause des protestations des défenseurs de l’environnement.
Il y eut un seul drainage, à San Luis, à une faible distance de la Réserve nationale pour les oiseaux migrateurs de Kesterton. Les étangs alimentés avec cette eau inondèrent les marais et les terres près de Los Banos. Les oiseaux commencèrent à mourir en grand nombre, les petits naissaient avec de graves malformations et le bétail qui pâturait alentour tomba malade. La cause en était le sélénium, un élément naturel dont on trouve fréquemment la trace dans le sol du désert ; il était lessivé par l’irrigation et entraîné par les eaux du drainage. La solution à court terme consista à drainer les étangs, à les recouvrir de terre, et à fermer la réserve de faune sauvage (31).
L’usage intensif de la chimie en agriculture permet des rendements supérieurs sur moins d’hectares, mais l’agrobusiness intensifie le processus d’épuisement du sol, ce qui entraînera probablement la désertification, une salinité accrue et la contamination par des résidus toxiques. Le processus d’accumulation devient aveugle aux résidus toxiques de l’utilisation des insecticides, fongicides, herbicides et engrais provenant du pétrole. Le drainage dans ces projets d’irrigation intensive pollue l’eau du sol avec toutes ces toxines, mais cela lessive aussi les métaux toxiques comme le plomb et le sélénium contenus dans les sels du sol.
Il en résulte des maladies car ces produits chimiques contiennent des éléments cancérigènes, d’autres qui produisent des malformations et des mutagènes qui produisent des mutations génétiques. En 1988, le syndicat UFW (United Farm Workers) demanda que cinq pesticides toxiques utilisés par les viticulteurs (dinoseb, bromure de méthyle, parathion, phosdrine et captan) soient interdits.
Les produits chimiques utilisés dans les pesticides et pour d’autres usages agricoles sont rarement testés correctement et les effets de leurs combinaisons sur le corps humain ne sont pratiquement jamais étudiés. En 1996, une étude fédérale a découvert que la combinaison de certains produits chimiques accélérait la production d’oestrogènes par le corps humain, une hormone qui entraîne des cancers du sein et le dysfonctionnement des organes sexuels masculins. Les hommes travaillant dans des usines de pesticides près de Stockton sont devenus stériles après avoir été exposés à ces produits (32).
Les habitations toxiques
Le boom de la construction a été entretenu par la création de CDO (Collateralized debt obligations) (33) lancés par le marketing agressif des subprimes et d’autres prêts hypothécaires risqués, qui devinrent des « actifs toxiques » quand la bulle éclata et que le marché se trouva rapidement atteint par les saisies immobilières et l’effondrement des prix. Un actif toxique est un concept abstrait qui touche surtout les investisseurs qui y sont exposés, mais le boom immobilier fit construire des centaines de milliers de maisons qui étaient littéralement toxiques. La simultanéité du boom immobilier national et de la reconstruction de la Nouvelle-Orléans après le passage des typhons Katrina et Rita en 2005, créa une demande massive en cloisons sèches (drywall : sorte de Placoplâtre).
C’est ainsi que les constructeurs importèrent de Chine 250 millions de kilos de cloisons sèches qui furent utilisées en partie pour la construction des maisons dans la Vallée centrale. Ces cloisons sèches chinoises dégagent du disulfure de carbone et de l’acide sulfocarbonique, provoquant la corrosion des tuyaux en cuivre, des fils électriques et des installations. Les gens ont souffert de saignements de nez, d’eczémas et les enfants ont attrapé des infections des oreilles et des voies respiratoires supérieures (34). Voilà la parfaite métaphore qui qualifie les conditions économiques que crée sans vergogne la concentration capitaliste et dans lesquelles la classe ouvrière des Etats-Unis doit vivre et travailler durement : toxique !
Une image de notre propre avenir ?
La concentration capitaliste a continué sans répit en Californie depuis l’allusion de Marx, et elle s’est même accélérée, laissant dans son sillage un pays dévasté et empoisonné, des écosystèmes contaminés et des vies intoxiquées, car le capitalisme contamine tout ce qu’il touche jusque dans les relations humaines et sociales.
Dans son roman The Octopus, Frank Norris appelle « véritable esprit de la Californie » une attitude qu’il fait remonter à la ruée vers l’or et qui est toujours vivante :
« Ils n’avaient aucun amour pour leur terre. Ils n’avaient aucun attachement pour le sol, ils travaillaient leurs fermes comme ils avaient travaillé dans les mines un quart de siècle auparavant. Pour gérer les ressources de cette merveilleuse vallée de San Joaquin, ils la considéraient de façon mesquine, avare, hébraïque. Tirer le maximum de la terre, la pressuriser, l’épuiser, semblait être leur politique. Si, à la fin, la terre s’épuisait, refusait de produire, ils investiraient leur argent ailleurs ; d’ici là, ils auraient tous fait fortune. Ils s’en fichaient : « Après nous le déluge (27). »
Marx affirmait que nous observons « les phénomènes qui se produisent dans leur forme la plus typique » et de son temps cela signifiait « production et échange » et conditions des « travailleurs de l’industrie et de l’agriculture » en Angleterre (ceci pour répondre à ceux qui disent que « les chose ne vont pas si mal »là où ils vivent). Les conditions toxiques de la Vallée centrale de Californie affectent les vies humaines autant que la santé de tout l’écosystème. Si le développement capitaliste ne rencontre pas d’obstacle, tout ce qui précède nous montre comment la crise de suraccumulation du capital entraîne la dépossession de la classe ouvrière et la pollution de la planète. Comme Marx le prévoyait :
« Le pays le plus développé industriellement ne fait que montrer à ceux qui le suivent sur l’échelle industrielle l’image de leur propre avenir. »
De te fabula narratur ! (c’est de toi qu’il s’agit dans cette histoire) Horace (36) »
————————————————————————————————————————–
NOTES
(1) Le mot « toxic » a été traduit par toxique, il n’a pas de sens moral, mais est utilisé en référence aux actions « toxiques » des banques, dès le début de la crise. (NdT.)
(2) Voir « Tranche de vie à Tent City »- sur le campement d’Ontario en Californie, article mis en ligne le 22 mars 2008 sur le site de l’En-dehors (momentanément inaccessible). (NdT.)
(3) Source : « Center for Tresponsable Lending », « Foreclosures »,
(4) Fin 2008. Source : agence Bloomberg, 3 février 2009.
(5) Source : 2007 Annual Report du National Law Center on Homeless and Poverty
(6) Ce terme péjoratif désigne aux Etats-Unis les maisons d’habitation prétentieuses singeant les vieilles demeures, mais de construction récente et utilisant des matériaux modernes. Voir housing-market-colla
(7) « Exurban sprawl » : littéralement « étalement suburbain », désigne l’extension des zones résidentielles de faible densité qui grignotent l’espace rural, au-delà des villes et de leurs banlieues, provoquant des conséquences écologiques négatives à grande échelle tels que la « protection » de terre entendue comme la préservation de ressources naturelles et de la biodiversité. Ces zones incluent les aires commerciales le long des routes,à la périphérie des villes et des banlieues. Pour plus d’information : ecologyandsociety.org
(8) Wall Street Journal, 11 août 2009, p. A3.
(9) Voir les comptes rendus de la rencontre avec « Governator » et le maire à Tent City et d’une visite de solidarité pour aider à construire des toilettes.
(10) Gray Brechin, Farewell, Promised Land : Waking from California Dream, Berkeley, University of California Press, 1999, p. 77.
(11) Source : http://realestate.yahoo.com/Foreclosures
(12) Source : http://www.frej.net/news/news/2009-…
(13) Source : http://www.ers.usda.gov/StateFacts/…
(14) Source : « Central Valley town owns nation’s dirtiest air »,
(15) Source : http://personalmoneystore.com/money…
(16) http://www. fresnobee.com/868/story…
(17)http://www.nytimes. com/2009/03/26/…
(18) New Jack City, film américain de Mario Van Peebles (1991), met en scène deux policiers, l’un d’origine africaine, l’autre d’origine italienne, ayant souffert de la drogue pendant leur enfance, et qui se jurent de démanteler le réseau du chef de gang Nino Brown, qui règne sur Harlem. (NdT.)
(19) Un résultat du mouvement anti-chinois, souvent mené par des groupes ouvriers autour du slogan « les Chinois doivent partir », fut le Chinese Exclusion Act de 1882, qui bloqua l’immigration jusqu’en 1943.
(20) On appelle Dust Bowl (littéralement bol, ou bassin, de poussière) une série de tempêtes de poussière, véritable catastrophe écologique qui a touché la région des grandes plaines aux Etats-Unis et au Canada, entre 1934 et 1940. La sécheresse et de terribles tempêtes de poussière, qui pouvaient durer plusieurs jours. 3 millions de personnes,surtout des familles de fermiers de l’Oklahoma (Okies)et de l’Arkansas (Arkies), émigrèrent vers la Californie. John Steinbeck décrit cette période dans son roman Les Raisins de la colère. (NdT.)
(21) Les Industrial Workers of the World (litt. « Ouvriers industriels du monde ») sont nés en 1905 à Chicago. Après l’entrée en guerre des Etats-Unis en 1917, ce syndicat garda des positions antimilitaristes qui lui valurent d’être la cible des « patriotes », puis il fut brisé par une série de procès judiciaires et les attaques répétées des milices patronales, de la police et de l’armée.Il cessa de compter dans le mouvement ouvrier américain au début des années 1920. Les IWW organisaient les ouvriers au niveau de l’industrie et non par métiers comme il était d’usage aux Etats-Unis ; ils ne se substituaient pas aux travailleurs mais renforçaient leur autonomie, et refusaient toutes négociations avec le patronat. Ses militants appartenaient aux basses couches de la classe ouvrière : travailleurs migrants, saisonniers et non qualifiés de toutes sortes, que le principal syndicat de l’époque, l’American Federation of Labor (Fédération américaine du travail), fondée en 1886, ignorait au profit de l’organisation des seuls travailleurs qualifiés.
Voir, sur les IWW : Larry Portis, IWW. Le Syndicalisme révolutionnaire aux Etats-Unis, éd. Spartacus, réédité en 2003, et Franklin Rosemont, Joe Hill : les IWW et la création d’une contre-culture ouvrière révolutionnaire, Editions CNT-Région parisienne [on peut consulter Joe Hill. Les IWW et la création d’une contre-culture ouvrière, note de lecture de Loren Goldner. (NdT.)
(22) Hobo : travailleur itinérant, jeté sur les routes par la révolution industrielle et le capitalisme sauvage de la fin du XIXe siècle, le hobo constituait une réserve de main-d’œuvre mobilisable n’importe où dans le pays. Son mode de transport privilégié était le voyage clandestin en train de marchandises. Travailleur généralement sans qualification, souvent doté d’une conscience politique et d’un bagage culturel, le hobo était emblématique de l’IWW. Voir en français un ouvrage sociologique écrit par un ancien hobo : Nels Anderson, Le Hobo. Sociologie du sans-abri, éd. Nathan, 1993 ; et l’autobiographie d’une femme hobo : Boxcar Bertha, éd. L’Insomniaque, 1994. (NdT.)
(23) Edward W.Soja, Postmodern Geographies : The Reassertion of Space in Critical Social Theory, Londres, Verso, 1990. P. 191
(24) On trouve une définition cohérente sur le site de
(25) Loren Goldner, {Ubu Saved from Drowning}, Cambridge, Mass. : Queequeg Publications, 2000. P. 85
(26) Source : http://forecast.pacific.edu/articles/PacificBFC_Fish%20or%20Foreclosure.pdf‘, Perspectives Internationalistes le 11 août 2009.
(27) http:// www.michaelpollan.com/artic…
(28) http:// www.centralvalleybusinessti…
(29) D’après une étude de la American Lung Associated sur les villes les plus polluées, publiée le 29 avril 2009.
(30) http://www. womenshealthmag.com/fil…, 26 décembre 2008.
(31) C’est en 1968 que fut créé le drainage de 134 km de long de San Luis ; le réservoir consistant en douze étangs d’évaporationà l’intérieur de la réserve naturelle de Kesterson, fut achevé en 1971. Le sélénium s’accumula peu à peu, et c’est à partir de 1981 que furent constatées la disparition des espèces sauvages de poissons et d’oiseaux et les malformations et l’empoisonnement du bétail. Les concentrations de sélénium constatées à Kesterton étaient supérieures à 1 400 microgrammes par litre. Le seuil de toxicité du sélénium est estimé à 0,5 mg.ou 0,7 mg/jour.
Ce n’est qu’en 1987 que le résevoir fut déclaré zone toxique. (NdT.)
(32) Gray Brechin : Farewell, Promised Land…, op. cit., p. 168
(33) CDO : produit financier assis sur l’endettement des particuliers, surtout dans l’immobilier. (pour collateralized debt obligation, en français, « obligation adossée à des actifs »). (NdT.)
(34) Wall Street Journal, 6 août 2009. p. D1, D4 – et New York Times, 7 octobre 2009
(35) Frank Norris, The Octopus : A Story of California, 1901, rééd. New York : Penguin Books, 1986, p. 298.
(36) Karl Marx, Le Capital : une critique de l’économie politique, Livre premier, préface de la première édition allemande.